Rapport sur la procédure d'enquête appliquée au Québec lors d'incidents impliquant des policiers

  • 16 février 2010
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Commentaires de la protectrice du citoyen aux médias à l'occasion du dépôt à l'Assemblée nationale du rapport sur la procédure d'enquête appliquée au Québec lors d'incidents impliquant des policiers

16 février 2010

La grande majorité des Québécois fait confiance aux services policiers. Cette confiance est essentielle au maintien de l’intégrité de notre système de sécurité publique et de justice criminelle.

Lors d'enquêtes sur des événements qui impliquent des policiers et qui entraînent des blessures graves, ou la mort, cette confiance doit être maintenue. 

Le respect des droits des citoyens concernés et des droits des policiers doit alors être garanti. Le processus doit, sans équivoque, assurer aussi bien l’apparence de justice que la justice elle-même.

Avec mon équipe, j’ai analysé la Politique du ministère de la Sécurité publique qui régit ces enquêtes.

Nous avons constaté :

  • l'absence de règles formelles  et l’encadrement inadéquat;
  • le manque de transparence;
  • l'apparence de partialité;
  • l'absence d'indépendance;
  • des lacunes dans la surveillance et l’imputabilité.

Parce qu’elles sont en interaction, ces différentes lacunes ont un effet cumulatif et se renforcent. Leur portée d’ensemble est ainsi plus grande que leurs seules conséquences individuelles.

Ces lacunes dans la prodécure d'enquête ne signifient pas en soi que le travail des policiers est déficient ou partial. Toutefois, la perception négative que créent les conditions entourant ce type d'enquête lui porte un préjudice sérieux.

Nos constats m’amènent à formuler huit recommandations. 

Elles portent sur :

  • le renforcement et l’encadrement du processus d’enquête, par des modifications à la Loi sur la police instituant des obligations spécifiques à respecter lors des incidents impliquant des policiers;
  • la formation des policiers à leurs devoirs et obligations en de telles circonstances, à être assurée par l’École nationale de Police;
  • la transparence du processus d’enquête et de ses résultats : le gouvernement devrait adopter des lignes directrices à cet effet;
  • l’impartialité, par la présence d’enquêteurs civils en plus d'ex-enquêteurs policiers et par une représentation équilibrée de la diversité;
  • l’indépendance, par la création d’un Bureau des enquêtes spéciales, un organisme lui-même indépendant, soumis à des exigences strictes de fonctionnement et de reddition de comptes. Ce Bureau serait financé en majeure partie par une réallocation de ressources déjà investies. Il aurait charge des enquêtes sur les incidents graves impliquant des policiers et de la surveillance des pratiques d’enquête.

Je formule ces recommandations dans l’espoir que  leur mise en œuvre prévienne des situations qui sèmeraient à nouveau le doute et mineraient la confiance de la population.

Le rôle et les responsabilités importantes des policiers dans la société entraînent des risques qui les placent dans une situation particulière, laquelle requiert un encadrement particulier et adapté. Les policiers seraient les premiers à bénéficier d’une confiance accrue de la population en la rigueur de la procédure et en l’impartialité des personnes chargées de réaliser une enquête sur leurs actions.

Je suis consciente des changements de culture et de pratique que ces recommandations appellent. Je sais qu’une période de transition sera nécessaire. Je  suis cependant convaincue qu’il est dans le meilleur intérêt public de renforcer les conditions qui permettent de maintenir et de soutenir la confiance de la population envers le travail exigeant, complexe et essentiel des policiers.